Galentz Haroutioune
Gurune (Turquie), 1908 – Erivan (Arménie), 1967
Galentz fit ses études primaires à Alep. Il fréquenta, dès 1927, l’atelier d’Onnig Avédissian, où il acquit quelques notions de dessin. Quand il arriva à Beyrouth les seuls peintres qu’il rencontra étaient Dobelle, Cyr et Michelet. Quel horizon s’étendait devant lui, sinon cet épuisement devant le réel ? Michelet assura sa formation et influença ses premiers tableaux : intérieurs, femmes lisant ou cousant, paysages. Cette influence fut si flagrante qu’il ne vit pas la possibilité d’une autre démarche picturale. Quand il enseigna la peinture à sa femme, par exemple, ce fut du Michelet, par Galentz interposé, qu’elle se mît à faire.
Après les années qu’il avait passées à Alep, la question du rapport de Galentz à Beyrouth, où il s’installa en 1930, mérite d’être posée. À la même époque, Cyr portait une interrogation picturale, mais délaissée au profit de la nécessité de produire et de vendre ses aquarelles et d’une facilité nouvelle qui faisait peu à peu oublier les complications de Paris. Galentz, lui, était le jeune peintre arménien de talent, inquiet et torturé, qui embarquait sa femme, Arminé, sur le même bateau de la peinture, navire de fortune plutôt que de nécessité. Il avait découvert la peinture comme une photographie réinterprétée. Il n’est pas question de se mettre à sa place, de retrouver ses motivations, ni même de poser la question des modalités de transmission ou d’acquisition d’une culture picturale. Sa peinture, comme toute autre, ne pouvait échapper à un jeu d’influences, mais les assimilant toutes d’un seul coup, il trouvait le terrain libre. Les contraintes de la figuration et de la ressemblance jouaient bien moins, en l’espèce, que les nécessités de la toile même et la prise de conscience de son autonomie.
En 1946, Galentz regagna l’Arménie et fit une carrière de « peintre émérite de la République socialiste d’Arménie ». Que restait-il de son œuvre à Beyrouth ? Une grande mosaïque à l’entrée du Regent Hôtel, place des Canons, des portraits, des paysages, une approche moderniste des dissonances de la couleur et diverses commandes des milieux francophones.
Comment placer en perspective sa peinture de 1946 à 1967, date de sa mort à Erivan ? Était-ce un retour en Arménie comme lieu mythique où la peinture pouvait enfin rejoindre le désir ? Il avait trop appris l’usage de la peinture fraîche, et comment l’affadir. Il ne pouvait faire plus que dans l’horizon beyrouthin. Aouad lui aussi s’était tourné vers un retoucheur employé par un photographe arménien de la rue Gouraud, pour apprendre la peinture.
Galentz avait commencé de cette façon avec Michelet en 1927, à un moment où la photographie n’avait pas le statut d’artisanat et ne se posait pas en rivale de la peinture. Galentz, lui, voyait l’une et l’autre, tout simplement, comme un seul métier à exercer.